Atelier avril 2019 : cartes devinatoires

Publié le par GFEN 33

Atelier avril 2019 : cartes devinatoires

Lors de cet atelier nous avons interrogé les cartes, aussi bien le tarot de Marseille (classique) qu'un magnifique jeu de cartes dit de Grenoble (conçu par la Chartreuse Card Club, vous le trouvez ici).

Nous avons oscillé entre passé et avenir en passant par le présent et avons rendu hommage à Jostein Gaarder (Le mystère de la patience) et Italo Calvino (Le Château des destins croisés) qui nous ont aidés à créer l'ambiance pour notre écriture devinatoire!

Nous vous invitons à jeter un regard dans l'intimité de la voyance:

Une battante dans le cœur, vous viviez néanmoins cachée à la vue de tous. Ce masque que vous portiez chaque jour, vous écœure toujours un peu plus.

Vous croyiez sans voir et tentiez de briller dans des cours trop viles, alors vous restiez enchainée, perdue entre le passé et l’avenir, entre la pomme et la poire, entre vous et vous, à l’arrêt au moindre pépin.

Est-ce votre reflet qui perce ce miroir arrogant ? Je ne le crois pas. Il n’est que l’ombre mutilée d’un avenir rêvé, fantasmée, construit sur une bataille instable qui n’a jamais été la vôtre.

 

A présent votre cour saigne, lacéré à vif, brouillé par une chance inaboutie et trompeuse, infligée dans une totale abnégation. Votre patron, lui, faux vainqueur s’y niche souriant aux éclats de vous voir vous effacer, en perdre votre latin, ou votre allemand et vos croyances ; fanant, vous intoxicant et espérant rondeur et douceur d’un étranger un peu vieillard incapable de se retourner sur son passé imprécis.

Alors vous restez sur vos gardes, et vous vous cachez derrière un drapé confortable et douillet, enchevêtré sous une couche de tâches qui ne sont pas les vôtres, même le clavier de votre ordinateur semble se moquer.

Mais votre intuition vient du cœur, votre confiance était et se terre, elle est aux aguets, aux portes des révélations.

 

Ces portes, vous ne les pousserez pas, mais vous les ferez exploser. Puis, vous vous dévoilerez. Jetant ce masque que vous ne saurez plus voir. Vidant ces mots jusqu’alors murmurés dans un récit silencieux et sans écho.

L’écho est en vous, scintillant dans vos cellules, se précipitant au gré des descentes sinueuses.

Vous vous rapprocherez de vous-même en parcourant le fleuve de la finalité, laissant glisser hors de vous des conséquences dont vous ne saurez que faire.

La sentez-vous l’étoile briller en vous ? Elle irradie de chaleur ce corps caché, cet esprit camouflé. Votre nouveau supérieur (hiérarchique NdlP) n’est autre que votre passé que demain vous laisserez filer au côté de la pleine lune.

 

Marine

 

Vous êtes encore puceau, dites-vous et vous faites le lien avec votre puberté tardive. Mais ne vous êtes-vous jamais posé la question des influences néfastes des personnes de votre entourage direct? Votre père, par exemple, un homme sans gêne qui se faisait appeler Roi des Pique-assiettes, et qui, tous les soirs, vous obligeait à un rituel de cape et d'épée. Ce qui se passait sous cape avec les épées n'a jamais été révélé au grand jour, mais cette expérience vous a enchevêtré dans un jeu identitaire bien trop complexe pour votre âge. Les jours de neige, votre père vous habillait en princesse du soleil et vous chassiez ensemble les mouches bleuâtres cherchant à se poser sur les feuilles de trèfle de la jardinière. Oubliez les vestiaires de la piscine avec vos camarades pubères, gardez plutôt en tête les séances d'habillement orchestrées par ce chef de famille. Comme souvent dans la bourgeoisie provinciale, votre père vous a transformé en objet pour assouvir ses désirs inavouables. 

Aujourd'hui vous avez trouvé un remarquable moyen de compensation. Vos promenades quotidiennes au milieu des fleurs des champs, entouré de papillons frivoles, d'alouettes coquettes et de calices colorés, vous transportent dans une métaphore où le vocabulaire amoureux se cache précieusement dans un décor à connotation d'innocence : comment déflorer un champ? comment sentir les papillons ingérés par inadvertance et en route pour le ventre? comment répondre à un regard coquet dans un miroir aux alouettes? Et comment surtout comment colorier les calices en restant à l'intérieur des lignes? La nature est votre subterfuge, votre refuge qui vous permet de faire l'amour sans le faire, de déflorer sans dépuceler, de ramasser sans cueillir, de fourmiller sans papillonner, de remplir sans décharger...

Mais bien entendu c'est votre avenir qui vous intéresse! La force croisera votre chemin car, dans exactement 11 jours, vous rencontrerez une jeune femme dont le rêve sera de faire de vous le roi de son coeur. D'allure plus classique que bourgeoise, vous la reconnaitrez à sa robe longue drapée par-dessus des pieds nus. Avec lesquels pieds elle vous fera d'abord un appel vous invitant à humer les fleurs de champs qu'elle aura fraichement cueillies. Elle fera également allusion à une petite gêne à l'oeil gauche, ladite gêne elle nommera "papillon" et elle vous proposera de boire un elixir concocté par ses soins  dans son propre calice ressemblant à une fleur de lys. Intuitivement elle saura adopter les gestes pour vous mettre en confiance, vous accompagner sur le chemin naturel de l'amour pour vous transformer en son roi, le roi lion.

Vous finirez par hurler de plaisir, vous aussi.

Plume

 

Publié dans Le Levain 2018-2019

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